CIVISME ET POLITIQUE

Le Civisme de Jésus

"Il allait de lieu en lieu, faisant du bien à tous."

 
 Civisme et politique 

vus du point de vue biblique

 à la lumière de Jésus

et de son évangile.


11 accélération de l'histoire

13 Voici l'homme

15-devoir de désobeissance

16 Jesus notre seul avenir

17-BABEL orgueil des hommes

18-92ans evolution

19 Dieu-la religion-l'Eglise



 

CIVISME PRATIQUE PAR JÉSUS.

REFUS DU POUVOIR PAR JÉSUS.

1100 Voici deux épées.

1110 Remets ton épée à sa place.

L'APPROBATION DIVINE

1130 Impatience et endurance.

1140 Approbation divine.

1150 Conclusion.

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Sa morale d'anticipation

 Il faut se demander quelle était la motivation profonde de ce prophète qui " passait partout en faisant du bien à tous..."? Quel était le ressort de cette activité d'amour du prochain, tellement intense qu'elle semblait anormale même à sa famille? Hâte, impatience et fébrilité d' un "voyant" tendu tout entier vers un but,vers un Événement proche dont le prophète annonçait la venue et dont par la foi, il se voyait le réalisateur. Pour Jésus," rendre à Dieu ce qui est à Dieu "c'est préparer et hâter l'arrivée du royaume de Dieu,c'est se porter au-devant de ce monde neuf et même anticiper ce Règne par un civisme totalement prophétique. Ce que la morale de Jésus annonce et anticipe, c'est ce qui aura lieu dans le Royaume. Cette morale anticipatrice rendait ainsi déjà actuelles les réalités de cette " terre nouvelle où la justice habitera" ( II Pierre 3.13 )

Pourquoi ce serviteur de Dieu aime-t-il et sert-il avec amour tous les hommes qu'il rencontre, juif ou non-juifs? Parce que l'Amour sera la réalité du Royaume de Dieu, la substance même de toutes les relations humaines dans la cité où le Père, vu " face à face", assurera lui même la liberté, l'égalité et la fraternité universelles. Le ministère de Jésus anticipe ce qu'il annonce: la mort ne régnera plus?

Morale d'anticipation, assurément !

Mais anticipation de quoi ?

C'est clair dans l'activité,la proclamation et l'enseignement de jésus: c'est le Royaume de Dieu que Jésus veut "anticiper", non pas en en faisant paraître la plénitude par un coup de baguette magique, mais en pratiquant déjà lui même les " valeurs" éthiques de ce royaume et en demandant à ses disciples de les incarner dés à présent dans leur comportement au milieu de ce monde.

S'agit-il d'indiquer le principe de base de cette royauté du Seigneur Dieu? Jésus répond aux pharisiens qui l'interrogent là-dessus:

"Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, et de toute ta pensée.

C'est le premier et le plus grand commandement. Et voici le second, qui lui est semblable:

"Tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépendent toute la loi et les prophètes.

(Matthieu 22. 37 à 40 )

  Le fondement de ce civisme d'amour, avec ses deux faces indissociables, n'est autre que la " loi" de Moïse, révélée par le Seigneur Dieu: l'amour, l'"agapé", l'amour qui se donne et qui sert, prêt au sacrifice. Or ce Dieu, qui " est amour" ( I Jean 4. 8 ) est le Dieu qui " vient". Pas seulement le " Dieu qui était et qui est" mais aussi le Dieu qui " vient", qui vient créer cet avenir d'amour qui remplira la terre entière. Jésus actualise cet avenir.

S'agit-il d'enseigner le contenu de la prière agréable à Dieu ? Là aussi Jésus enseigne la priorité des demandes pour le Règne de Dieu: " Que ton règne vienne!" .

S'agit-il de proclamer la Promesse du bonheur et de la bénédiction par ces paroles qu'on appelle les " béatitudes", c'est l'arrivée du Royaume qui est la clef de chaque promesse:

" Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés!..Heureux les pauvres car le Royaume de Dieu est à eux! "et c..

.( Matthieu 5. 3 et Luc 6.20 ) .

S'agit-il des " signes" opérés par Jésus ( guérisons, miracles, exorcismes, pardons,et c..)ils sont signes du Royaume qui vient, bien plus: du Royaume qui est déjà en train de commencer par l'activité civique et politique du prophète Galiléen.

S'agit-il des actes d'incivilité ou de désobéissance dont Jésus se rend coupable par rapport aux règles religieuses ou aux convenances ( violation volontaire de la réglementation sur le sabbat, expulsion des marchands hors du parvis du Temple, fréquentation délibérée des exclus et des marginaux, propos très désobligeants au pharisien qui l'avait invité à sa table, et c....) c'est toujours dans la perspective du Règne en train d'advenir que Jésus règne sa conduite. Amour, en conflit permanent avec les règles établies et les logiques des Pouvoirs. Mais, en agissant ainsi, Jésus est l'Homme de l'Avenir, le citoyen de la Cité de Dieu prophétisé par les prophètes.

Le radicalisme de l'Amour: l'Amour des ennemis.

Mais c'est une trahison de l'Évangile que de vouloir édulcorer et minimiser ce qui est au coeur de la morale évangélique: l'amour des ennemis.

Ce commandement du Maître, commandement auquel il s'est lui-même conformé jusqu'à accepter de mourir sur la croix, est non seulement le point culminant du civisme de Jésus mais aussi le point critique où la première alliance bascule du coté de l'alliance nouvelle et éternelle, celle du Royaume de Dieu. Lorsque Jésus met un terme au système archaïque, traditionnel et légal, de l'hostilité légitime contre les méchants qui font du mal, lorsqu'il abolit les principes sacrés de la légitime défense individuelle ou collective, il renverse en fait l'ordre des choses établi en ce monde dans toutes les sociétés humaines depuis le meurtre de Caïn et l'alliance de Noé ( Genèse 4 et 9. 5-6 ).

En prescrivant à sa communauté " Aimez vos ennemis" le Seigneur annule toutes les limitations et toutes les exceptions que son peuple faisait subir au double commandement d'amour sorti de la bouche de Dieu.

Jusque là, sur la base de la loi du talion et de son juste et équitable principe, il était licite et normal d'user de représailles contre l'ennemi, de lui rendre coup pour coup et éventuellement de le mettre à mort ( par exemple dans la punition de la femme adultère, dans le blasphème contre Dieu ou dans la guerre sainte à la manière de Josué et de la conquête du pays promis). Désormais, Jésus supprime toute exception au " tu ne tueras pas" fondamental de la loi de Moïse. Il abolit toutes les atténuations et toutes les réductions qui viendraient nier la portée radicale du double commandement d'amour, sous quelque précepte que se soit. Et il ose énoncer la règle d'or subversive qui,ni plus ni moins, arrête le cours normal des choses dans les rapports humains et, si on peut dire, met fin à ce monde:

" Vous avez appris qu'il a été dit:

Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis,

bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, afin que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous? Les publicains aussi n'agissent-ils pas de même? Et si vous saluez seulement vos frères, que faites-vous d'extraordinaire? Les païens aussi n'agissent-ils pas de même? Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait."

( Matthieu 5.43 à 48 )

N'oublions pas le sens que prend ici le mot amour et évitons un malentendu courant: " Aimez vos ennemis" ne veut pas dire: " éprouve pour ton ennemi des sentiments d'affection" ( comme en éprouve un fils pour sa mère ). Encore moins cela veut-il dire: " aie envie de ton ennemi" ( comme l'on "aime" le chocolat ! ) Le mot "aimer", ici,( en grec " agapé", et le verbe " agapeïn") exprime le choix et la décision de faire du bien à l'ennemi, de ne pas lui nuire, de le servir en faisant pour lui ce qu'on souhaite recevoir pour soi-même, de ne pas lui rendre le mal pour le mal, de ne pas le " contrer" en usant contre lui des mêmes armes qu'il emploie contre nous. C'est très exactement, de la non-violence active au service de cet adversaire que je n'ai pas choisi et dont je désapprouve le comportement.

Le contraire de cet amour ( le non-amour de l'ennemi ) est mal rendu par la traduction " tu détesteras" ou " tu haïras". Là encore il ne s'agit pas tellement de sentiment mais d'attitude pratique de non- choix, de non-service, de non-respect, et c... Il en va de même pour la bonne traduction du passage: " Si quelqu'un ne hait pas son père, sa mère....il ne peut-être mon disciple" ( Matthieu 14.26 ). Traduire " aimer moins" serait en tout cas bien préférable!

D'autre part il est bien difficile de soutenir l'opinion que, dans ce commandement d'amour pour les ennemis, il ne s'agirait que des ennemis privés et personnels et nullement des ennemis publics et collectifs ( contre ceux-ci, l'épée serait donc légitime ! ). En effet Jésus dit:

"Vous avez appris qu'il a été dit: oeil pour oeil, et dent pour dent. Mais moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant. Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre. Si quelqu'un veut plaider contre toi, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Si quelqu'un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui. Donne à celui qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi."
( Matthieu 5. 38 à 42 )

Les exemples cités par Jésus nous placent sur le terrain politique, juridique, ou du droit exercé par les autorités romaines ( voir Matthieu 27.27 à 32 ) De même la mention de la "loi du talion", inscrite par la loi de Moïse pour réguler le bon exercice de la justice ( voir Exode 21. 24 et suivants, Lévitique 24.17 à 22,Deutéronome 19.16 à 21 ) nous empêche de limiter l'amour de l'ennemi au domaine privé et nous interdit de cantonner la " non-violence" aux relations individuelles à l'exclusion de la politique. Non, c'est tout le domaine de la vie humaine, le politique et le privé, qui est concerné par l'ordre de l'amour des ennemis. Dans toute son acuité est donc posée la question de la participation aux guerres et au service militaire, pour un chrétien qui se veut fidèle à son maître.

Nous retrouverons cette question lors de l'examen du civisme du chrétien. Pour l'instant, puisqu'il s'agit des positions et du comportement de Jésus lui-même, posons la question: Jésus a-t-il opté pour l'emploi éventuel de la violence armée et meurtrière, par exemple en cas de légitime défense ou de résistance juste à des oppresseurs ou des tyrans?

A cette question il faut donner une réponse absolument négative. d'une part il a rejeté la position des "zélotes" qui, par zèle pour Dieu, assassinaient les soldats de l'occupation romaine. D'autre part, lors de son arrestation, il a interdit à ses disciple de le défendre par les armes. Et cloué au bois de la croix, il a demandé à Dieu de pardonner à ses bourreaux..C'est cette position-là,la mort volontaire sur la croix, qui met le comble à l'amour......Et qui subvertit tout l'ordre politique de ce monde en le jugeant et en le condamnant. Et de grâce, qu'on cesse d'objecter à cela l'épisode bien connu de l'expulsion des marchands du Temple! Qu'on donne, au contraire, toute son importance à l'épisode du refus du Pouvoir par Jésus, en Galilée.

Le civisme de Jésus et l'anticipation de son Règne politique.

   Il vaudrait la peine de s'attarder sur le récit de la " purification " du Temple, à Jérusalem. Cet acte subversif de Jésus, en effet sert d'argument simpliste à tous ceux qui tiennent, à tout prix, à montrer que le Maître Galiléen a été violent, en tout cas éventuellement violent. C'est commode pour justifier la coopération des chrétiens aux guerres des nations et c'est d'autant plus facile que, nous dit-on, la bible est remplie de violences,tout comme le psychisme profond de l'être humain!

Ne nous laissons pas séduire par la confusion souvent faite entre l'agressivité naturelle du gamin qui joue à la guerre et la violence meurtrière du criminel ou du soldat qui prive de la vie un autre homme. Ce n'est pas la même chose! Et ne prêtons pas l'oreille complaisante aux prêcheurs d'une juste violence guerrière ou d'un juste usage de la force armée en avançant l'argument que voici: " de toute façon, nous sommes tous pécheurs, nous avons tous du sang sur les mains, c'est pure hypocrisie de prétendre se garder les mains propres....."

En expulsant les marchands du temple, Jésus n'a pas usé d'une violence meurtrière contre ces vendeurs-là ou ces changeurs d'argent. il n'a pas employé fouet ou bâton que pour chasser les animaux et renverser les étalages. Aucun des quatre témoignages évangéliques ( Matthieu 21.12 à 19, Marc 11.15 à 17, Luc 19.45 et 46, Jean 2. 13 à17 ) ne permet d'établir le contraire. Même le verset 15 de Jean 2 mérite une meilleure traduction que d'habitude. La minutieuse exégèse du pasteur Jean Lasserre a montré que la tournure du texte grec permet de traduire: " Il les chassa tous du Temple, précisons ( ou "à savoir") les brebis et les boeufs" ( voir Jean Lassere " la guerre et l'Évangile", la réconciliation. Paris 1953, page 54 ).

Sans entrer dans le détail, il est bon de souligner plusieurs caractères essentiels de cette " action civique non-violente".

Tout d'abord c'est une action énergique. La non-violence d'amour pratiquée par Jésus est à l'opposé d'une attitude de lâche passivité, de mollesse politiquement désengagée ou de non consentement silencieux aux injustices de ce monde.

En second lieu cette action de Jésus est un engagement civique, une action publique dans la cité humaine et au service du peuple.Quand Jésus "fait le ménage" dans cette grande cour des païens,non loin du sanctuaire du Seigneur Dieu, il fait acte de civisme. Et il n'ignore pas ce que ce civisme va lui coûter.

En effet, en troisième lieu, cette action et cette manifestation " révolutionnaires" ( et même " anarchistes" à certains égards) ont une signification politique. Elles visent les Pouvoirs et elles portent atteinte à l'argent ( à la liberté du marché !) Pour Jésus, le Temple tout entier est le siège de l'exclusive souveraineté d'Adonaï, le Seigneur d'Israël, le seul et unique Dieu à adorer. Tout autre dieu est une idole. Or, tolérer l'invasion du Temple par " Mammon" ( le dieu de l'Avoir) ou par "César" ( le dieu du Pouvoir ) est une insulte à IHWH, le seul vrai Dieu. Il faut donc renverser les idoles et expulser les dieux des cités humaines, afin de servir la politique du Roi de Sion et d'Israël,

Bien sûr, ce jour là, cet acte spectaculaire n'a été qu'un geste symbolique: les marchands sont revenus le lendemain dans la cour du Temple! Et c'est Jésus, quelques jours plus tard, qui a été exclu de la cité de Dieu et crucifié hors les murs de la ville sainte. La non-violence protestataire du Maître n'est pas payante ni efficace.

Mais ce témoignage incroyablement courageux a été prophétique en ce sens qu'il a annoncé l'avenir. Il anticipait la cité dont Dieu lui même sera l'architecte et le bâtisseur, ce royaume de Dieu où l'Argent ne fera plus la loi et où les Pouvoirs, Autorités, Dominations et Seigneuries ( politiques et ecclésiastiques ) seront éliminés et abolis.... par le souffle du Messie. Non, ne suivons pas ces étranges exégètes qui ont prétendu que Jésus voulait, par cet acte-là, déclencher réellement une offensive contre les chefs du Temple, et qu'il a échoué. Disons plutôt: " Ainsi s'accomplit la prophétie de Zacharie ( 14. 21 )" En ce jour là, il n'y aura plus de marchands dans la maison du Seigneur ( IHWH) des Armées."

Suite
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Georges SIGUIER  1920--2016
 (Pasteur, Église réformée de France)  


 

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