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Salvador Dali

 

92 ans d'évolution personnelle

1°  POLITIQUE ET GUERRE
2°  "RELIGION, EGLISE, UNITE"

Mazamet 2012


 

 Civisme et politique 

vus du point de vue biblique

à la lumière de Jésus 

et de son évangile.



11 accélération de l'histoire

13 Voici l'homme

15-devoir de désobeissance

16 Jesus notre seul avenir

17-BABEL orgueil des hommes

18-92ans evolution

19 Dieu-la religion-l'Eglise

20-vive l'Apocalypse-accueil.

21-accueil-l'imminence de la fin

22-conduite-a-adopter

23accueil-harmaguedon.

24000-accueil-jerusalem.











1°  POLITIQUE ET GUERRE

5. L'APRES -GUERRE 1945-1946

Temps mort?
On aurait pu penser qu'une fois la guerre finie rien ne serait plus comme avant. Nombreux étaient ceux qui pensaient que la disparition des fascismes serait suivie de " lendemains qui chantent".
Pour ma part j'estimais que l'horreur des massacres avait été telle que, chez les chrétiens, s'écrouleraient la vielle théologie de la guerre juste et la religion national-patriotique.
Il n'en fut rien, hélas! Il fallut déchanter. Le " Plus jamais ça!" des rescapés des camps allemands ne fut qu'un cri immense qui, très vite, faiblit au choc des réalités. A l'échelle planétaire on s'aperçut très vite que " c'était toujours ça!": crimes contre l'humanité et génocides se sont succédés. Les impérialismes européens et américains n'ont pas disparu du tout, aujourd'hui encore. A Yalta, Staline, un des défenseurs du monde "libre" mais aussi fasciste qu'Hitler, pouvait annexer une partie de l'est européen!
Néanmoins, au niveau individuel, le début de l'après-guerre n'a certes pas été un temps mort! On revivait... Pour ma part, ce temps-là a été merveilleux: j'avais retrouvé ma fiancée, ma radieuse Colette tellement éprouvée par ma captivité. Le temps des amours était là!
L'année universitaire 1945-1946 nous a rapprochés, à Montpellier, elle pour la licence es lettres et moi pour la fin de mes études de théologie.  Dès lors nous n'avons jamais été séparés, si ce n'est par le brusque décès de Colette, à l'âge de 67 ans.
L'année qui a suivi la fin des combats a été, à Montpellier, l'âge d'or du mouvement étudiant que nous appelions la " Fédé" (Fédération française des Associations chrétiennes d'étudiants). Le Z était le président ou la présidente du groupe local: j'étais fier que ma fiancée soit Z cette année-là! Et je participais moi aussi à la vie de la Fédé, comme la plupart des " théologiens".
Autant il avait été impossible de  penser dans la deshumanisation des camps, autant, cette année-là, notre pensée à tous rattrapait le temps perdu et s'attachait à renouveler notre compréhension du monde et notre recherche spirituelle.. Une double richesse intellectuelle caractérisait, à ce moment-là, notre Faculté méridionale. D'abord l'occupation de la France par les Allemands avait provoqué la convergence vers le midi de nombreux étudiants parisiens et alsaciens; certains d'entre eux devinrent par la suite professeurs de théologie ou responsables nationaux de l'Eglise réformée. Ensuite la plupart de ces jeunes avaient vécu la clandestinité, le maquis, la captivité ou l'armée, pendant plusieurs années. Il est facile d'imaginer à quel point ils avaient " mûri" en expérience de la vie et en sagesse.
Sans être allé très loin dans la connaissance de l'Evangile, j'en savais déjà assez pour avoir quelques certitudes: la certitude que nos Réformateurs du 16° siècle s'étaient trompés en justifiant la participation à la guerre, que Karl Barth lui aussi n'était pas assez net, clair et radical, sur ce point crucial de l'amour des ennemis, et qu'à l'inverse , la pensée des objecteurs de conscience au service militaire devait être absolument prise au sérieux.
Hélas! il n'en a pas été ainsi et, de 1946 à 1991 je constate que, chez les chrétiens la pensée reste la théologie de " chrétienté".
Depuis la fin de la guerre nous aurions  mieux fait d'écouter le théologien André Trocmé ( pasteur au Chambon sur Lignon en Haute Loire, a écrit " Jésus Christ et la révolution non-violente" Labor et Fides 1961)   que  de montrer Dietrich Bonhoeffer comme le modèle du parfait résistant chrétien ( Pasteur et théologien protestant , exécuté par les nazis 1906-1945). Le premier, pour sauver des centaines d'enfants juifs, a pratiqué le civisme non-violent de Jésus; le second a été pendu par les nazis pour avoir pris part, en 1944, au complot pour assassiner Hitler.
Bien sûr, comment pourrais-je blâmer Bonhoeffer puisque sa foi " national-patriotique" était la mienne en 1943-1944? !
Mais j'avoue être triste en constatant que l'immense majorité de mes confrères pasteurs et prêtres, persistent aujourd'hui à égarer les jeunes chrétiens en préconisant, au sujet de la guerre et de la politique, le contraire de ce que Jésus dit, veut, ordonne et bénit.
Je suis reconnaissant et heureux de ce que Dieu, à partir de septembre 1946, a mis sur ma route des objecteurs de conscience: mieux que des controverses c'est le témoignage de leur vie ( en prison!) qui m'a fait évoluer dans et vers le bon choix.

6. 1946-1978 LES OBJECTEURS DE CONSCIENCE
Ce sont eux qui ont accéléré mon évolution jusqu'au pacifisme non-violent et radical de Jésus.
Cela s'est fait en deux étapes.
D'abord de 1946 à 1955, à Hénin -Liétard ( aujourd'hui Hénin-Beaumont) dans le bassin minier du Nord, au cours de mon ministère pastoral. Ensuite de 1955 à 1978, à Toulouse, où j'ai été un des pasteurs de l'Eglise réformée. Dans les deux cas j'ai fréquenté des objecteurs de conscience au service  militaire et à la guerre.
Dans les deux cas, ces amis avaient été en prison ou s'y trouvaient, à cause de leurs convictions.


Je citerai d'abord les Témoins de Jéhovah. C'est dans les camps de concentration que je les ai rencontrés. Ils avaient été les premiers à y être internés par les nazis. Ces détenus-là se reconnaissaient au triangle violet qu'ils avaient à leur veste, tandis que les " politiques" ( résistants, maquisards et c...) portions un triangle rouge. Beaucoup de leurs camarades avaient été décapités, avant la guerre, parce qu'ils refusaient de prêter le serment à Hitler. Leur non-violence était radicale: ils préféraient mourir ou souffrir plutôt que de désobéir au commandement de Dieu: " Tu ne tueras pas.."
 Comment n'aurais-je pas été impressionné par leur témoignage?

Pendant les neuf ans passés dans le Nord de la France, mon ministère de pasteur m'a permis de fréquenter des collègues objecteurs de conscience. Ces pasteurs exerçaient leur ministère dans des paroisses belges, près de la frontière.. J'ai honte de dire qu'à ce moment-là l'Eglise réformée de France ne voulait pas parmi ses pasteurs des objecteurs de conscience! Délit de fidélité à l'Evangile! Et emprisonnés par la Justice française comme traitres à la Patrie! Mais de 1946 à 1955, ils étaient avec nous, bien sûr, dans les rencontres de pasteurs et leur contribution était importante pour notre réflexion commune sur le problème de la guerre.
En ce domaine, notre principal guide spirituel était le pasteur Henri Roser, de Paris, notre aîné. (C.F. Pierre Kneubühler: " Henri Roser: l'enjeu d'une terre nouvelle" édition Les bergers et les mages 1992- Nous étions ensemble dans le Nord avec Pierre K. à ce moment là)  En 1923 il avait renvoyé  son fascicule de mobilisation et, en septembre 1939, il se rendit volontairement aux autorités militaires. Pendant quatre ans il fut incarcéré à la prison de Rambouillet.
De leur coté Camille Rambaut, Jacques Martin et Philippe Verrier ( "Philo") avaient, en 1932 et 1933, connu la prison après avoir été condamnés pour refus de revêtir l'uniforme militaire.
Ce n'est qu'en 1963 qu'a eu lieu la légalisation de l'objection de conscience, avec le vote d'un statut spécial, grâce au général de Gaulle, chef de l'Etat... à la suite de la grève de la fin "sine die" menée par un anarchiste non-violent de 72 ans, Louis lecoin.

Cette année-là, j'étais pasteur à Toulouse, depuis 1955. Je peux dire que, jusqu'en 1972, j'ai vécu un vrai bond en avant dans la théologie et la pratique de la non-violence active, celle de Jésus. Le mérite n'en revient pas au protestantisme toulousain ni aux rencontres oeucuméniques! C'est grâce aux jeunes objecteurs détenus à la prison St Michel et à  " l'Action Civique Non-Violente", mouvement de civisme très actif, engagé non seulement dans le soutien des objecteurs mais aussi dans la protestation contre la torture pratiquée dans la guerre d'Algérie.
Nommé aumônier des prisons, j'allais à la Maison d'Arrêt chaque semaine. J'y visitais trois objecteurs de conscience: Jean Pezet
 ( catholique), Eric Pot (protestant)  et Jean Lagrave ( agnostique). A la petite réunion biblique que je présidais se joignait toujours Henri Lacquement, jeune criminel condamné à  la "perpétuité" et devenu en prison un "caîd" redouté. Inoubliables rencontres!  Et, pour moi, une source incroyable de progrès théologique et de " désintoxication politique".
Il y avait des temps forts: lors des procès d'objecteurs, place du salin, lorsque venaient, de paris et du Nord, Henri Roser, Philo Vernier... et, de Castres, la fiancée admirable de Jean Pezet. La séance du tribunal était publique: on assistait alors à un dialogue entre Roser, une Bible à la  main, et le Procureur de la République, assez mal à l'aise!
Celle qui nous galvanisait pour le " sit-in" silencieux devant les grilles du tribunal, c'était une infirme en fauteuil roulant: Marie Lafranque, chercheur au C.N.R.S., traductrice du poète espagnol Garcia Lorca, agnostique, anarchiste, d'une douceur exceptionnelle, calmant mon éventuelle irritation par une parole de l'Evangile!

Si bien, qu'à mon tour, en décembre 1959, j'ai retourné à l'expéditeur mon livret militaire.
A partir de là, évoluant encore, j'ai compris que l'objection de conscience de Jésus, le Messie de Dieu, portait non seulement contre l'emploi des armes meurtrières mais aussi contre l'exercice du Pouvoir politique par les chrétiens: jésus s'était enfui quand la foule voulait le faire Roi!

Aussi bien, quand advint mai 68, j'étais mieux " armé"  pour ne pas céder au chant des sirènes théologiques qui, en matière de civisme, prenaient parti pour Che Guevara, Régis Debray et les guérilleros d'Amérique Latine. Finalement, leur théologie était la même que celle de Jeanne d'Arc, canonisée et adulée: la, guerre juste!



N.B. Pour approfondir, voici  une petite bibliographie:
-" Les sorciers du ciel: prêtres, pasteurs..." par Christian bernadac ( éditions France-Empire 1969)
- " La guerre et l'Evangile" par jean Lasserre ( éditions La Réconciliation, paris 1953)
- " Jésus Christ et la révolution non-violente". par André Trocmé ( éditions Labor et fides 1961)
- " Tu ne tueras pas" témoignage, par Jean Pezet, Le roitelet, Rascas, 81100 Castres.
-" Un amour subversif: jésus, l'Eglise et la légitime défense" par Michel Collewaert ( éditions Fidélité/ cerf 2011)

.... et d'abord et surtout

                Les quatre Evangiles: L'arrestation de Jésus: Jean 18. 1 à 12

                                   La crucifixion de Jésus : Jean 19. 16 et suivants
                                    La non-violence du " Roi des Juifs: Jean 20

 

Georges SIGUIER  1920--2016
 (Pasteur, Église réformée de France)  


 

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