Reliques, statues,
livres de prières..... En 1914, de part
et d'autre du front, on mobilisait Dieu et des
milliers de prêtres pour soutenir le moral
des troupes.
Les
croisés de 14-18
" Notre Joffre
qui êtes au feu, que votre nom soit
glorifié, que votre victoire arrive,
que votre volonté soit faite sur la
terre et dans les airs.... " A genoux, poilus
! La guerre de 1914 fut l'occasion d'une
farouche union sacré entre le sabre et
le goupillon de toutes les armées de
tous les pays engagés dans le
conflit. Si vous vagabondez dans la
Somme, cet été, vous le
vérifierez en allant voir à
Péronne, l'exposition " Guerre et
ferveurs", dont la singularité,
l'insolence et, avec le recul des ans,
l'humour involontaire vous raviront. Vous y
découvrirez qu'à Paris comme
à Berlin, à Saint-Pétersbourg comme à Londres, on
a décliné dans toutes les
langues le Got mit uns ( " Dieu avec nous")
germanique; que sur chaque front la guerre,
chaque religion et ses
célébrants étaient
annexés au service de la juste cause.
Un chiffre éloquent: de 1914 à
1918 32699 prêtres, religieux et
séminaristes français, dont
1500 aumôniers furent
mobilisés. A Péronne, sont
exposées entre autres reliques, cette
édifiante plaquette d'un certain
pasteur Fayot. L'appel de la France et
l'appel de Dieu, et la prière du
pauvre fantassin et de sa mère,
écrite par un
jésuite. Confusion entretenue du
temporel et du spirituel dans une même
surenchère patriotique. Et comme il
est arrivé que la dévotion vira
à la bigoterie, le style sulpicien en
majesté a fait parfois des
ravages. Pour preuve la statue de l'Ange
et du soldat: un poilu en bleu horizon est
agenouillé devant une sorte d'archange
saint Michel, peint comme un Roi mage de
crèche, toutes ailes
déployées.... Il fallait
une certaine hardiesse de pensée pour
organiser, et réussir, une telle
exposition, qui bouscule
inévitablement quelques vieux
tabous. Alors qu'on vient de
célébrer fastueusement
l'anniversaire du débarquement de
1944. " Guerre et ferveurs" rappelle que
la grande guerre fut d'une autre nature,
qu'elle fut endurée par des
combattants dont le système des
valeurs était hérité du
XIX siècles. La séparation
de l'Eglise et de l'Etat, imposée par
le petit père Combes en 1905, n'a rien
changé à l'affaire: en 1914, la
République avait supplanté
depuis belle lurette l'ancien régime
de " Dieu et mon Roi", mais devant
l'immensité des périls, la
nation rassemblée proclamait sans
hésiter: " Dieu est de notre
coté !"
Jean
Belot
Guerres et
ferveurs. Historial de la Grande Guerre,
Péronne.
|