Le civisme prescrit par
Jésus.
L'Amour
Les pages précédentes ont voulu
mettre en lumière la singularité absolue du
civisme chrétien .Le civisme du disciple de
Jésus est essentiellement un civisme d'amour mais
d'amour divin " surnaturel". Et s'il porte en lui la
non-violence et le refus du pouvoir proprement politique
c'est qu'il est la mise en oeuvre, dans la
société, de l'amour prescrit par le
Maître à ses disciples.
Il est donc profondément différent
du civisme prescrit aux juifs par la Tora de Moïse
et par le Décalogue. La loi de Moïse est
" ce que Dieu a dit aux
pères" tandis que Jésus est venu
pour dire: " Il a été
dit à vos pères:... mais
Moi je vous dis:" Et la différence
culmine principalement au niveau de l'amour pour les
ennemis. Notons cependant que cet amour est
prophétisé aussi, en bien des pages de " la
loi et les prophètes". ( Jean 5. 46- I Samuel 24.
1 à 23 et 26. 1 à 25 ). Mais
Jésus seul l'accomplit et désire
l'accomplir aussi " en son corps, son assemblée",
c'est à dire en ses disciples.
De même le civisme du chrétien est
radicalement différent du civisme du
musulman. Le Dieu de l'Islam n'est pas le même
que le Dieu de Jésus et le civisme prescrit par le
Coran est une variété de " religion
civile", monothéiste et inséparable d'une
politique théocratique variable selon les temps et
les lieux:
" Ce dieu, prêché sous le nom d'Allah,
que rien ne limite, dont la puissance est infinie, dont
la Parole tombe du ciel sous forme écrite, sans
failles et sans fragilités, qui consacre une
langue sacrée unique, qui transforme son
prophète en chef de guerre invincible, etc...." (
Jean Ansaldi " la fragilité du Dieu de la croix"
Journal " Ensemble" mai 2002.) est l'inverse de
Jésus, le Dieu crucifié, et de son
Père qui se veut en précarité, en
fragilité, en obscurité, en
laïcité !
Un civisme extraordinaire.
" Vous
avez appris qu'il a été dit:"
tu aimeras ton prochain et tu haïras ton
ennemi". Et moi je vous dis: aimez vos
ennemis et priez pour ceux qui vous
persécutent, afin d'être
vraiment les fils de votre Père qui
est aux cieux...! Car si vous aimez seulement
vos frères, que faites-vous
d'extraordinaire? Les païens
n'en font-ils pas autant? "
( Matthieu 5. 43
à 48 ) TOB.
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Notons bien ceci: cet "
extraordinaire" du comportement social et politique du
chrétien est l'amour, non-violent et actif, au
service de l'ennemi quel qu'il soit ( privé ou
public ). Et cet ordre du Maître n'est pas fait
pour nous décourager et nous pousser à la
transgression ( " il met vraiment la barre trop haut !"
me disait un ami) . Il nous est donné pour
provoquer notre libre et joyeuse
obéissance. Si, par amour pour lui, je fais
un petit pas sur ce chemin d'obéissance,
lui-même m'assistera de son souffle saint et me
donnera la force d'aimer .(" la force d'aimer" de Martin
Luther King).
Au temps du Seigneur les occasions de pratiquer cette
extraordinaire force ne manquaient pas! A tout moment les
légionnaires de l'armée d'occupation
romaine pouvaient te réquisitionner pour une
corvée ( Matthieu 5. 41 ), te forcer à
o=porter le bois horizontal d'une croix derrière
un condamné à mort juif
épuisé par la torture ( Matthieu 27; 32 ),
ou même te clouer sur le bois ( Luc 23. 33 )! Qui
aurait pu imaginer un instant qu'il y aurait un jour des
légionnaires "chrétiens" capables de placer
la croix du Christ sur leurs drapeaux et sur leur
uniforme? !
Georges SIGUIER 1920--2016
(Pasteur, Église réformée de France)