Le mot et la chose continuent
de faire peur,d'autant plus que, pour le langage
courant,l'anarchie est le chaos produit par un refus
d'observer des règles. Alors que l'anarchisme est
une " conception politique qui tend à supprimer
l'État, à éliminer de la
société tout Pouvoir disposant d'un droit
de contrainte sur l'individu" ( dico.Petit Robert
).
En étudiant les
Écritures, j'ai mis très longtemps à
m'apercevoir que, d'après elles, le but ultime de
la politique divine était
précisément une Cité
éternelle d'où serait éliminé
tout Pouvoir dominateur: toute Autorité faisant
peser son joug sur les individus devenus enfin libres...
d'aimer Dieu librement .Et maintenant je suis convaincu
que selon la phrase d'André Malraux, " le
Christ est un anarchiste mais le seul qui a
réussi". Cependant son
anarchisme est pour Dieu et par Dieu: "
théocratique" donc.
En effet la lecture attentive de
l'apôtre Paul ( 1° lettre aux Corinthiens) et
de l'Apocalypse de Jean ( chapitres 19 à 22)
conduit à la conclusion suivante:
grâce à sa mise
à mort volontaire, grâce à sa
résurrection et grâce à son
élévation au rang et au poste de Souverain
Seigneur,
le Christ Messie
pourra, au jour de son Avènement:
"
détruire toute Domination, toute
Autorité, toute Puissance"
( 1 Corinthiens
15.24).
Les Pouvoirs, politiques
et religieux, sont qualifiés d'"
ennemis
de Dieu "( verset 25
), tout comme le fait l'Apocalypse lorsqu'elle
dévoile le caractère diabolique et
anti-christique ( les " monstres")
de tout Pouvoir asservissant les peuples de toute la
terre.
L'anarchisme du Père et de
son Fils unique, au grand Jour final, renverra donc au
néant la Domination de tous les " Caïphe" et
" Ponce Pilate" d'hier et d'aujourd'hui.
Cette bonne nouvelle a-t-elle de
l'importance pour le comportement pratique du
chrétien et de l'Église, dans le domaine
politique et civique ? Oui, une extrême
importance.
En effet, si la conduite des
disciples de Jésus doit être conforme
à la conduite du Maître ( qui pourrait donc
le nier ?), alors l'éthique chrétienne doit
voir en tout Pouvoir politico-militaire un rival et un
adversaire du Seigneur et en tirer les
conséquences.
Jésus a
fui et refusé le Pouvoir, pourtant
à sa portée.
Il ne suffit pas de louer et de
pratiquer sa non-violence d'amour. Il faut aussi
louer et pratiquer son "non-Pouvoir" qui a atteint son
point culminant lorsqu'il est mort
supplicié.
Car c'est parce que le Messie
d'Israël s'est abaissé jusqu'à cette
totale faiblesse que Dieu l'a souverainement
élevé non seulement à la fonction
politique de " Roi et Sauveur" des Juifs, mais
aussi à la fonction politique de " Roi et Sauveur"
de tous les êtres humains, aussi bien ceux
du passé que ceux d'aujourd'hui ( lettre aux
Philippiens 2. 5 à 11 ).
C'est pourquoi " l'Église
chrétienne" se met très loin de la
véritable communauté messianique quand elle
pactise avec les " Puissances" ennemies de Dieu, quand
elle cherche l'appui de l'État et donne à
l'État son propre appui, quand elle fait alliance
avec le Pouvoir et les Chefs politiques et surtout (
quelle honte !) quand l'Église devient
elle-même un État avec un Chef dont on
proclame qu'il règne
!!
La
" chrétienté", hélas, a
été et demeure cette
théocratie-là
qui est l'exact
contraire de la théocratie "
anarchiste" du Seigneur Jésus, le
Christ.